Les Whitsunday Islands sont l’une des destinations les plus prisées de l’Australie et l’on sait désormais pourquoi. Situées entre la côte nord-est et le récif de la célèbre Grande Barrière de corail, elles offrent une nature somptueuse et peu empruntée si l’on s’aventure au-delà des quelques îles habitées et des circuits organisés par les tours-operators. Il faut donc que l’on vous raconte comment nous les avons découvertes. C’était sur un voilier : nous avons été invités à naviguer pendant cinq jours. Et ça tombait bien car on ne savait pas naviguer.
En fait, ce qui est presque tout aussi beau, c’est la manière dont c’est arrivé.
C’est une parfaite illustration de ce que l’on aime dans le voyage : aller où le vent nous mène. Cette fois, il a soufflé vers le large.
La magie des rencontres
Tout a démarré à Nagasaki, au Japon, quand lors d’une soirée nous avons rencontré Jamie, cet Anglais de Bristol.
Les rencontres en voyage ont ça de fantastique, c’est qu’elles sont très souvent directes et sincères. Pas de convention, pas de temps à perdre car on se croise loin de chez nous. Dans quelques heures chacun reprendra son chemin (la plupart du temps).
Ainsi, une soirée, quelques bières et deux-trois mails plus tard, nous étions invités à rendre visite au père de notre nouvel ami, un Gallois septuagénaire prénommé Dewi. Ce grand gaillard, bavard et taquin, est venu passer sa retraite dans la petite ville d’Airlie Beach au départ de laquelle on accède aux Whitsunday Islands. « Il aime bien rencontrer des gens et cherche parfois une crew pour naviguer », nous avait dit son fils. La magie du voyage a opéré.
Bref. Depuis, les étoiles de nos nuits parfois houleuses sont encore imprimées dans nos yeux.
Un archipel volcanique
Les Whitsunday Islands sont un archipel de 74 îles de tailles variées situé donc au large d’Airlie Beach (Queensland) et baignant dans la mer de Corail. C’était autrefois des montagnes volcaniques rattachées au continent dont les sommets forment à présent les différentes îles.
Le nom vient de « White Sunday », autrement dit Pentecôte, donné par le capitaine britannique James Cook lorsqu’il les a découvertes en juin 1770, pensant que c’était en ce jour saint.
Durant les cinq jours, nous nous sommes cantonnés aux « Central Islands* », composées des îles principales. Mais déjà, elles offrent plusieurs baies plus ou moins profondes dans lesquelles s’amarrer, des plages léchées par de l’eau cristalline aux nuances infinies du turquoise à l’indigo, et des coins de nature où l’on a la chance (ou pas) de ne croiser personne si ce n’est un randonneur nudiste en communion totale avec la nature et les petits oiseaux.
Un air de Christohe Collomb
« Reeeady for tackiiing**? » « Euh, yèèèèès… » (On n’avait pas dit que je m’occupais de faire à manger ?). À part le pied marin, que l’on avait en théorie, on n’avait pas bien plus d’expérience que cela de la navigation. Mais par contre, on était super motivés pour apprendre !
On se voyait déjà avec le cheveu rayant d’un coup de vent la ligne d’horizon, le mat de la grande voile en diagonal et les dauphins en mode Claudette, dansant sur les flans du bateau. Vent de dos : à tout berzingue, quoi. (Oui, ça c’était avant, quand on pensait qu’il fallait avoir le vent de dos pour avancer… Ah ! Là on en a perdu quelques-uns…) Enfin voilà, c’était un peu l’image de départ. Un air de Christophe Colomb, sans Gégé mais avec la musique, les chœurs et un bateau de plaisance.
Dans la réalité, Captain Dewi nous a mis direct sur le pont pour apprivoiser Anthea, notre monocoque de 41 pieds, et c’est là même que nous avons réalisé que naviguer était un véritable sport. Il faut réagir vite, tirer les cordes de voiles qui pèsent une tonne, de préférence sans se retourner un doigt (suivez mon regard…). Alors on a tenté de comprendre les consignes et termes marins (en gallo-british criés aux vents sur flots sonores : bon courage), quelle corde tirer ou relâcher, et ce aussi vite que le vent ne tourne. Forcément, au début on a essuyé quelques haussements de ton et quelques chutes de vitesse… Mais au final, Captain Dewi nous a félicités de notre performance. On n’était pas peu fiers, tiens.
Au gré des vents et marées
Quand on navigue et de surcroît avec un voilier, il faut faire sans cesse des compromis avec Mère Nature. Parfois même, elle nous laisse au milieu de nulle part sans la moindre petite brise pour nous rafraichir… dans l’attente d’un vent plus fort.
Ainsi, notre route a été évidemment choisie en fonction de la direction et de la force des vents, ainsi que de l’heure et de la hauteur des marées. Bien souvent aussi, elle a été recalculée au petit matin, après le ponctuel bulletin météo crachoté par la radio. On a réalisé qu’il valait mieux en savoir un rayon et que le moindre faux pas peut entrainer d’énormes conséquences. C’est certainement à ce moment-là qu’on s’est assurés de quoi faire si jamais notre capitaine venait à tomber à l’eau… S’agit pas de se lécher le doigt pour savoir d’où vient le vent.
Une routine peu ordinaire
Par bonheur, Anthea était plutôt docile et nous avons pris un plaisir fou à sillonner la mer à son bord tout autour de ces jolies îles. La journée, on s’arrêtait sur de charmantes plages pour se baigner ou pour démarrer une balade vers des sommets envahis de forêt. Parfois même, on allait explorer les fonds marins, nageant dans le grand bleu jusqu’à la côte munis d’un masque, d’un tuba et d’une combinaison anti-méduse. En fin de journée, on s’amarrait pour la nuit à l’abri dans une baie. Apéro à 17h heures, dîner à 19 et dodo à 22, canés, après avoir admiré les étoiles, bercés par la houle. Déconnectés du monde des Hommes, connectés à la Nature et à nous-mêmes. Nos journées étaient bien remplies et nos nuits réparatrices.
Impossible de dire si nous aurions aimé voir ces îles autrement que par cette formidable occasion. On a eu beaucoup de chance, on le sait. Surtout au vu des catamarans bondés que l’on a croisés en quittant le port et en y revenant. Mis à part quelques autres bateaux qui partageaient avec nous la baie le soir venu et quelques touristes sur le magnifique lagon de WhiteHaven Beach, nous étions seuls. Enfin presque. Nous avons croisé le chemin de goannas (gros lézards) dans la forêt, vu plein d’oiseaux ça et là, nous sommes tombés nez-à-nez avec de grosses tortues venues respirer en surface, et avons admiré des poissons colorés et autres curiosités marines lors de nos plongées.
* Les « Central Islands » sont composées de North Molle Island, South Molle Island, Daydream Island, Hook Island, Whitsunday Island, Hamilton Island, Long Island, Lindeman Island, Haslewood Island et quelques autres plus petites.
** « Prêt à virer de bord ? »
~~~~~
Notre itinéraire
JOUR 1 : départ d’Airlie Beach en direction Hook Island. Amarrage dans l’une des ailes de Butterfly Bay et snorkelling de fin de journée.
JOUR 2 : cap vers l’est, amarrage au nord de la petite l’île de Dumbell située juste au nord de Whitsunday Island (l’île la plus grande qui a donné son nom à l’archipel). Joli snorkelling en fin de journée.
JOUR 3 : Départ pour Whitsunday Island ; amarrage à Tongue Bay. Marche jusqu’au point de vue qui surplombe le lagon de Whitehaven Beach, situé de l’autre côté. En descendant vers le lagon, baignade sur la jolie petite Betty’s Beach un peu plus loin derrière les rochers. Un régal ! Retour au bateau pour continuer le long de Whithaven Beach, passer devant Chance Bay et s’amarrer pour la nuit à Turtle Bay qui a la forme d’une… tortue.
JOUR 4 : on continue le long de la côte de Whitsunday Island, on passe devant Cid Island pour s’amarrer dans la charmante et peu profonde Dugong Bay. Baignade sur Lady Island (rebaptisée Lady Véronique Island pour l’occasion !), une île microscopique où seuls les oiseaux y nichent. Accès en zodiac au départ de la rando pour Whitsunday Peak pour aller admirer le superbe panorama 360° sur les îles alentours.
JOUR 5 : Retour vers Airlie Beach en passant à travers les Molle Islands, et Daydream Island pour saluer les trois sirènes.
~~~~~
À ne pas manquer !
S’extasier devant le lagon de Whithaven Beach. Ça ressemble un peu (mais en mieux) aux plages de sable blanc des fonds d’écran d’ordinateur que l’on regarde envieux quand il fait moins 5 degrés dehors, mais sans le dossier « urgent » posé à l’ombre du cocotier (il n’y a pas de cocotier de toute façon). Le meilleur moment pour s’y rendre, c’est entre deux marées afin de pouvoir admirer le lagon tout en nuances de bleu (et ne pas se retrouver avec que du sable ou que de l’eau bleu foncée… ce qui serait franchement dommage). L’aborder par le point de vue un peu plus haut qui offre une vue spectaculaire.
Randonner sur les hauteurs. Grimper au sommet d’une des îles pour admirer la vue surprenante que l’on a, en compagnie d’une grande bouteille d’eau et d’un chapeau. Nous sommes montés sur Whitsunday Peak sur Whitsunday Island (un peu moins d’une heure de marche).
Explorer les fonds marins. Certaines baies offrent une faune magique dans peu de profondeur, ne pas oublier de se jeter à l’eau avec masque et tuba pour une séance de snorkelling (combinaison obligatoire pendant la saison des méduses…).
Admirer les étoiles. On vous assure que l’on peut passer des heures à regarder le ciel de l’hémisphère sud pour chercher la Croix du sud. Et encore plus longtemps un verre à la main.
Naviguer de baies en baies. Si vous avez la chance de pouvoir découvrir les Whitsunday Islands à bord d’un bateau de plaisance, le simple fait de naviguer à travers les îles, de s’arrêter chaque soir dans une baie nouvelle, de calculer son itinéraire, de dormir au son des clapotis des vagues sur la coque est un bonheur en soi. Oui on sait, vous voulez bien nous croire… Mais tout de même, ça mérite d’être dit. ;-)
5 commentaires